Adaptation d’André Dussollier et Gérald Sibleyras -- d'après Novecento d’Alessandro Baricco -- mise en scène André Dussollier, Pierre-François Limbosch – photo : Christian Ganet – illustration : Stéphane Trapier -- vu le 25 février 2015 au théâtre Sorano – Toulouse
Embarquement pour un récit jazzy
Novecento, c’est le portrait d’un pianiste né sur un bateau et jamais descendu. C’est l’histoire à la première personne, semblable à une nouvelle de Zweig, d’un artiste incapable d’affronter le trop-plein du monde. Ce texte écrit par Alessandro Baricco en 1994, André Dussolier espérait le jouer depuis qu’il l’avait lu. Le comédien s’accompagne d’une poignée de musiciens pour nous y emporter au rythme des remous.
La salle est comble pour accueillir le tsar. Soudain le noir, les blabla qui se transforment en chuchotements. Dussolier entre en scène, sourire figé et voix légèrement nasillarde comme à son habitude, heureux d’être là. Ici, à la différence des rôles plus effacés et posés qu’il adopte souvent (On connaît la chanson, Mon petit doigt m’a dit...), il est seul maître à bord, capitaine du navire dont il esquisse les contours au fur et à mesure. En forme, il est partout, bondit, danse, fait virevolter sa voix pour nous atteindre nous, du haut de notre paradis. Le texte vivant dégouline de sa bouche comme un flot continu, bifurque, s’arrête jusqu’au souffle coupé ; puis recommence plus vif encore. Il a mangé le texte et s’avance, discutant avec nonchalance devant un public conquis. Et partant il change encore de rythme, se métamorphose, tantôt en capitaine, tantôt en grosse dame ébahie, chef d’orchestre de son monologue superbe dont il mime les personnages. Au détour d’une description, le texte enchaîne une série de jeux de mots autour de la navigation, rapidement accompagné du public hilare. Dussolier s’éclate.