Amis férus de théâtre classique, Sganarelle ou la représentation imaginaire n’est pas un nouvel ouvrage de thésard qui aurait planché quinze ans sur la place de Sganarelle dans le théâtre du 17e siècle. Derrière ce titre très « théorisant » se cache en fait la première comédie de Molière (Sganarelle ou le cocu imaginaire) remise au goût du jour par Catherine Riboli et sa troupe.
Un titre qui fait manifestement l’objet de tous les scrupules, puisque le texte de Molière n’a subi aucune coupe. C’est plutôt de rajouts dont il serait ici question. La metteuse en scène parle même de transgresser les codes du théâtre, terme qu’il faut prendre dans son acception polie, au sens de « prendre ses libertés sans trahir ni la pensée ni le texte de l’auteur ». C’est ainsi que Catherine Riboli fait prononcer les alexandrins de Molière dans le respect de la tradition la plus stricte (l’occasion d’entendre de belles diérèses), avec des costumes d’époque ET quelques idées de mise en scène qui font mouche.
« J’imagine un petit théâtre, comme une place carrée ou un kiosque, avec des spectateurs tout autour […]. » Catherine Riboli
Dans ce spectacle, c’est tout d’abord la scénographie qui surprend. En plaçant les tréteaux au centre d’un public invité à monter sur scène, le plateau prend l'allure d'une place de village, rejoignant l'idée initiale de Molière. Outre le bénéfice que peut en tirer le spectateur (renouvellement appréciable du point de vue habituel et plus grande proximité avec les personnages), la metteuse en scène utilise ce dispositif pour dissimuler Sganarelle au milieu de l’audience avant qu’il n’en jaillisse quand vient son tour. Sous ses vêtements contemporains, le personnage dénote complètement, d’autant qu’après être d’abord passé pour un spectateur téméraire pris par l’envie de faire l’intéressant, le voilà qui tantôt joue la comédie tantôt s’adresse au public pour commenter l’histoire en improvisant à sa guise. Une liberté qui en appelle une autre : on retrouve alors sur le plateau un jeu parfois très physique et quelques fantaisies qui feraient passer certains passages pour de la Commedia dell’arte.
Les spectateurs qui, à l’instar de votre serviteur, ont toujours quelques réticences avec le théâtre classique et l’alexandrin (« une langue vivante étrangère qu’on comprend », comme le dit très bien Pascal Vannson, qui occupe le rôle titre), peuvent donc se rendre à cette pièce les yeux fermés. Le compromis entre tradition et contemporanéité parait tout à fait digeste et le divertissement est de mise. Vraiment pas grand chose à voir avec un ouvrage de thésard…
Prochaines représentations, voir :
la Page Facebook de la compagnie
ou
le calendrier de Théâtre contemporain.net